J’ai bien mangé, j’ai bien bu, j’ai la peau du ventre bien tendue... et j’ai fait de beaux bâtards à l’Histoire.
Eh oui ! On en a raconté sur ma vie... et elle le méritait. J’avais un appétit d’ogre, des histoires plein la tête, de la matière à fournir, une compagnie de nègres à mon service, des rêves de châteaux d’If et d’Espagne, des compagnons mousquetaires, et le rire de Porthos qui résonnait par toutes mes foucades. Hola ! Hommes des siècles à venir, souvenez-vous d’Edmond Dantès, mais souvenez-vous aussi d’Alexandre Dumas !
J’en rajoute, j’exagère, je grossis, de toutes les façons possibles. C’est sûr. Mais comprenez un peu. Coincé que j’étais entre mon géant de père et mon greluchet de fils. Un, général, qui jouait de sa force colossale pour faire valdinguer ses soldats par le fond de pantalon, pour tenir à bras tendus quatre fusils, par ses doigts enfilés dans la bouche des canons, pour... fréquenter une certaine Pauline Bonaparte. Et un fils – quelle idée de prendre le même prénom – dont l’avenir reste attaché à la souffreteuse aux camélias et qui crut bon de m’envoyer quelques flèches par ses deux pièces : Le Fils naturel, et Le Père prodigue.
Alors, l’appétit de vivre... comprenez-moi ! Et si, visitant le Panthéon, ses bases tremblent quelque peu, c’est que mes cendres brûlent encore.