Fiches de lecture du livre numérique : LES VILLES D'OR

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LE REGARD DE LETTROPOLIS

L’Afrique du Nord sonne généralement pour les Français « Islam », « mauresque », « Kabylie », « Berbères », « Empire français », « soufflet d’Alger », « domination turque », « Oranie espagnole », « Arabes », « désert », « hydrocarbures », « Méditerranée », « soleil »... et bien autres choses encore... mais il est fort à parier que très peu parleront d’ « Afrique romaine », quand bien même des présences française, espagnole ou italienne seraient, au cours de l’Histoire, des gages d’ « Afrique latine ».
Louis Bertrand, pourtant membre de l’Académie française, auteur à succès de l’entre-deux-guerres, passionné d’Afrique du Nord, inconditionnel de lettres classiques, spécialiste de l’œuvre de Flaubert, doit être inconnu au plus grand nombre, seul son Saint Augustin ayant passé à la postérité grâce à d’obligeantes rééditions. Le style d’écriture de Louis Bertrand est d’un classique qui reflète à merveille la pureté littéraire de ce début de siècle dernier.
Dans Les Villes d’or, le voyageur adopte un point de vue qui ferait bondir aux rideaux les intellectuels patentés du XXIe siècle « si c’est bien un professeur d’histoire ancienne à l’Université qui nous en a conseillé la lecture, c’est en cachette, c’est en catimini. Certains iraient jusqu’à lui prêter des odeurs de « soufre », comme on dit, car Louis Bertrand serait un représentant trop autorisé du rayonnement de la France à travers le monde, et des délices de notre civilisation gréco-romaine et chrétienne... Pourtant, à une époque déjà lointaine, on reprochait à cet homme ne pas avoir fait un éloge assez sincère et convaincant de Maurice Barrès, qui l’avait précédé sur le même fauteuil académique... et on lui reprocherait aujourd’hui d’avoir été trop « nationaliste » et de ne pas avoir su apprécier les beautés de la « diversité » ? Ne commettons point d’anachronisme, et goûtons à l’originalité de sa thèse, exposée avec des atours stylistiques que nous ne renierons pas.
L’Afrique du Nord a été le grenier à blé de l’Empire romain, à une époque où le désert était plus lointain et où les Romains avaient pu y déployer toutes leurs connaissances en irrigation, en urbanisme et en acheminement de l’eau. Ces terres ont donné des empereurs à Rome, et notamment la cité de Leptis Magna, berceau de Septime Sévère, qui est sans doute l’un des plus beaux sites archéologiques romains du monde entier. Il a malheureusement souffert, dans des proportions non encore très bien connues, de pillages au cours de la récente « révolution libyenne »...
Les lieux, après avoir été le berceau de la théologie chrétienne (pensons aux Tertullien, Cyprien et Augustin) et de l’orthodoxie catholique, ont été souvent abandonnés en hâte lors des invasions barbares (en particulier vandales) puis arabes. De nombreuses villes se sont arrêtées du jour au lendemain, sans que personne ne s’y réinstalle jamais, demeurant dans un état de conservation et d’originalité à peu près parfait.
Si des sites comme Césarée ou Carthage ont souffert de la réutilisation de leurs ruines pour l’édification des villes nouvelles de Cherchell ou de Tunis, ce n’est pas le lot commun des « Villes d’or » d’Algérie et de Tunisie. Ces dernières sont incroyablement nombreuses, et leurs noms sont autant de découvertes « ou de souvenirs « pour le lecteur métropolitain : Théveste, Orléansville, Ténès, Gouraya, Tipasa, Castiglione, Aumale, Matifou... Thimgad, Lambèse, Cirta, Thibilis, Cuicul, Tubursicum, Madaure... Thugga, Thuburbo Majus, El-Djem, Sbeïtla, Haïdra, Gigthi... Thignica, Thubursicum Bure, Ammædara, Sousse, Sufetula, Hadrumète... Le romain a le grand mérite de se mélanger au berbère et au numide pour produire des merveilles d’art et de lignes.
Il y en a pour tous les goûts : grandes cités et petits municipes, colonies et villes militaires, cités portuaires et villes du désert, villes blanches et villes d’or, villes numides et villes berbères... Mosaïques, arcs de triomphe, thermes, théâtres, statues et temples ne manquent pas. C’est donc une redécouverte de l’histoire de cette région, à l’heure où l’on nous cache trop souvent l’histoire... Ne boudons pas notre plaisir à visiter ces prodigieux vestiges, quand nos banlieues modernes et notre béton armé auraient de quoi nous rendre dépressifs...

 

 

 

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