J’ai commencé ce roman il y a plus de vingt ans ; nous habitions Blois, et un concours de nouvelles avait été organisé. Je suis une grande lectrice de nouvelles policières, et j’avais décidé de concourir, mais avec une nouvelle policière se situant au 12e siècle. Pourquoi ? Parce que cette époque est celle qu’entre toutes je préfère ; l’aurore de notre civilisation.
» Un homme trouve, au petit matin, un cadavre dans le chantier de Notre Dame. « C’était le début de la nouvelle. C’est encore le début de De soie, d’or et de sang « c’est tout ce qui en reste, d’ailleurs.
Avec cette nouvelle, je n’ai pas gagné le prix, mais le virus. J’ai continué d’écrire, imaginant des scènes qui se raccrochaient, peu ou prou, aux premières pages. Des personnages sont nés. Au personnage principal, le drapier Pierre, est venu se confronter son double et son rival, Guilhem, l’ambitieux occitan.
Pourquoi un drapier ? Parce que les tissus me fascinent. Il m’est arrivé d’entrer dans un magasin, sans besoin aucun « rien que pour le plaisir de regarder et de caresser les rouleaux de velours, de drap ou de soieries, de les respirer aussi : les tissus ont une bonne odeur.
J’avais imaginé depuis longtemps déjà le récit de la fuite de Guilhem. Par la suite les idées me sont venues pour l’insérer dans l’intrigue. Il en a été de même pour bien d’autres scènes,. Par exemple, dans les pages de l’hebdomadaire « Famille chrétienne « Robert Hossein avait exprimé, il y a quelques années, sa « peur du jugement de Dieu « ; je l’ai figuré sous les traits d’un trouvère parvenu à un âge avancé, avouant la même angoisse. Le jeune Baudouin, novice prémontré, lui apporte une réponse inattendue.
Entre temps, j’ai trouvé du travail à Paris et nous avons dû déménager. Je me suis interrompue, j’ai repris. J’ai suivi le « stage roman « des ateliers Bansard, ce qui m’a aidée à achever. Le texte final était énorme, très long et désordonné.
Le foyer Edwige Feuillère, association qui vient en aide aux comédiens dans le besoin, a une petite activité éditoriale. Mon frère, qui en est le président, avait lu et apprécié mon texte mais ne pouvait éditer un roman de plus de sept cent pages. J’ai donc séparé mon premier écrit en plusieurs « branches « ; de ce matériau initial est sorti le premier roman (publié en 2010) et la moitié du second.
Il me reste encore quelques pages inemployées, notamment concernant la seconde croisade.
L’achèvement du Roman de Guilhem a été source d’une grande inquiétude. Je n’y parvenais pas, tout me semblait opaque. Et puis, tout s’est éclairci. Les dernières pages ont été écrites, en quelques heures. La fin de Guilhem, est-ce une défaite, une victoire ? Je n’ai donné aucune explication « je l’ai tenté mais c’était impossible. Au lecteur d’imaginer le sens qui lui plaira.